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La suite!
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C'est entouré de ses deux nouveaux amis qu'Allen fit son entrée au quartier général de la police criminelle de Philadelphie.
L'inspecteur Lilly Rush et son supérieur, Stillman, observèrent leurs imposants collègues installer le jeune homme derrière un bureau. Âgé d'une trentaine d'années, il semblait à peine peser la moitié du poids de Jeffries. Ses vêtements, sans être tout à fait misérables, semblaient n'avoir jamais connu de machine à laver. Ses cheveux, bruns clairs, aux reflets blonds, étaient filasses et hirsutes. Son regard bleu lançaient des éclairs tout autour de lui. Il se triturait les mains avec nervosité, et se balançait presque imperceptiblement d'avant en arrière sur sa chaise.
_Les premiers symptômes de manque, commenta Stillman.
_Merci, les gars, dit Lilly aux deux gaillards qui étaient allés lui chercher son "colis spécial".
_Mais y'a pas de quoi, lui assura Vera, sa bonne humeur retrouvée, avant de leur apprendre le peu de chose qu'ils avaient sur lui.
Stillman l'écoutait sans lâcher un seul instant Allen du regard, jusqu'à ce que Lilly aille s'asseoir près de lui au bureau.
_Inspecteur Lilly Rush, se présenta-t-elle.
Allen la fixa du mieux qu'il put, mais c'était comme s'il ne contrôlait plus ses yeux. Ceux-ci étaient fuyants, injectés de sang, et ils trahissaient la moindre de ses émotions. A commencer par la méfiance.
_Alors comme ça, poursuivit-elle, vous ne savez pas qui vous êtes.
Stillman se posta debout près d'eux. Un junkie en manque n'avait pas ce qu'on appelait des comportements prévisibles. Peut-être auraient-ils dû lui laisser les menottes?
_Je cherchais pas de la came, répondit Allen.
Ça avait bien plus d'importance à ses yeux que toutes les questions qu'ils pouvaient bien lui poser et auxquelles il n'avait de toute façon pas de réponse.
_Qu'est-ce que vous cherchiez, alors? demanda-t-elle avec douceur.
Son calme et sa gentillesse semblèrent avoir un effet réellement apaisant sur Allen, qui immédiatement, gagna en confiance:
_Je voulais seulement l'aider, dit-il.
_Qui? Mike? intervint Stillman.
Allen acquiesça.
_Je savais qu'il planquait de l'adrénaline quelque part. Au cas où...
... il arrive ce qui était arrivé.
_... mais ils m'ont pas laissé le temps de leur expliquer... ils croyaient que je cherchais juste de quoi me défoncer, c'est tout... alors que Mike était en train de crever...
Il s'interrompit, avec sur le visage une expression implorante. Il ne demandait qu'une chose: que quelqu'un lui dise qu'il le croyait. Il n'était pas un monstre d'égoïsme. Il avait vraiment voulu aider son ami.
_Pourquoi de l'adrénaline? voulut savoir Lilly.
_En cas d'overdose, expliqua Stillman. Une piqûre d'adrénaline dans le coeur et c'est reparti. Du moins jusqu'à l'arrivée des secours. Ça aurait pu suffire. Comment vous savez ça, vous? s'enquit-il alors, auprès d'Allen.
Celui-ci renifla nerveusement, et ferma ses poings, ne supportant plus ses mains qui tremblaient.
_Je le sais, c'est tout, dit-il.
Stillman haussa les sourcils, un poil étonné. Cet homme l'intriguait sérieusement. Lilly aussi, mais pas exactement de la même façon.
_Vous me croyez?
_Oui, répondit aussitôt Lilly. Bien sûr qu'on vous croit.
Allen baissa la tête, cachant ainsi son soulagement.
_Allen? C'est bien comme ça que vous vous appelez?
_Non... c'est comme ça
qu'ils m'ont appelé, corrigea-t-il.
_Alors quel est votre vrai prénom?
_J'en sais rien. J'arrive pas à m'en souvenir. J'ai essayé, mais...
Il se frotta le front avec le dos de sa main, essuyant la sueur qui commençait à perler sur son visage, puis son balancement d'avant en arrière s'intensifia.
Lilly jeta un regard inquiet à Stillman qui haussa les épaules. Ils pouvaient tout à fait poursuivre un peu leur interrogatoire.
_A quand remonte vos plus anciens souvenirs, demanda-t-elle alors à Allen.
Il secoua la tête. Cet effort de mémoire le rendit plus nerveux qu'il ne l'était déjà.
_Novembre, lâcha-t-il finalement.
_Novembre de l'année dernière? vérifia Stillman.
Il hocha la tête mais ça se vit à peine tellement il était agité.
_Laissez-moi deviner, dit alors Stillman. La cicatrice que vous avez là...
Il écarta une mèche de cheveux sur le front d'Allen, qui eut un mouvement de recul.
_Elle aussi, remonte à novembre?
Allen leva les yeux vers lui. Il ne le contredit pas. Mais ne put rien affirmer non plus.
_Est-ce que vous allez m'aider?
_C'est pour ça que vous êtes là, le rassura Lilly.
A Stillman, elle glissa:
_Je peux vous parler?
_Bien sûr, dit-il.
Et ils s'écartèrent de quelques pas.
_On devrait appeler un médecin, et l'isoler avant que son état empire et qu'il nous fasse une crise.
_C'est une sage décision, commenta-t-il d'un air absent.
Décidément, il ne parvenait pas à lâcher leur mystérieux junkie du regard. Lilly fit donc le tour de Stillman, innocemment, afin qu'il la regarde, elle. Tentative réussie. Il lui demanda:
_Que pensez-vous de lui?
Elle haussa les épaules:
_Je ne sais pas trop. Sa perte de mémoire est peut-être due à la drogue, ou bien un coup sur la tête, ou un choc émotionnel ou traumatique. Peut-être un accident. On devrait se renseigner auprès du bureau des personnes disparues.
Stillman acquiesça et lâcha:
_Sa tête ne m'est pas inconnue.
Comme il lui cachait la vue, Lilly se pencha sur le côté et observa attentivement Allen. Elle plissa les yeux, tenta de l'imaginer en meilleure santé, avec des cheveux en moins, et quelques kilos en plus.
_A quoi pensez-vous? lui demanda-t-elle ensuite, incertaine.
_On va relever ses empreintes et lancer une recherche dans le fichier national. Quelque chose me dit qu'on est pas au bout de nos surprises.
à suivre...